Tour du Pic Turbat
Le 14/08/2021 par Cathy et le groupe rando alpi
Nous avons rendez-vous au Désert, au fin fond de la vallée de Valjouffrey, le 14 août pour une randonnée alpine de 7 jours dans les Ecrins autour du Pic Turbat. Le nom m'intrigue et promet une aventure !
Je ne connais personne dans ce groupe du CAF du Mans.
Première bonne surprise : le voyage avec mes compagnons de route où nous faisons connaissance et découvrons que nous avons un certain nombre de points communs, ce qui est normal pour des cafistes sarthois ! La bonne humeur et l'envie de découverte sont au rendez-vous. Seconde bonne surprise : ils s'y connaissent en astronomie ! Troisième bonne surprise : le lieu est sauvage et vide de touristes, pour beaucoup restés au bas de la vallée, au bord du plan d'eau du camping "Valbonheur"!!!
Au programme de ceux arrivés en avance : deux randonnées de mise en jambe : la montée aux Orgues de Valsenestre : gigantesques millefeuilles de calcaire extrudé et de marnes qui s'élèvent à des dizaines de mètres au-dessus de nos têtes ; et le col de Plancol (avec un O et non un U) au pied du vertigineux Grand Armet (qui réclamera un été prochain notre visite).
L'aventure officielle commence le dimanche matin, départ du Désert-en-Valjouffrey à 7h30, pour le refuge des Souffles , par la longue ascension sur GR du Col de la Vaurze (2490 m), et pour bien démarrer, un Haïku de Jean Yves : « Le Soleil pointe. Nous marchons vers le sommet. La lumière est là. » Dès le premier jour nous goûtons à la randonnée alpine : après avoir déposé nos sacs à l'abri des regards à proximité du col , nous atteignons le Pic des Scies de Sainte Anne (2730 m) par la traversée d'un pierrier abrupt , la remontée de pentes de terre raides et ravinées et de pelouses suspendues pour finir sur une impressionnante crête effilée : premier aperçu de ce qui nous attendra toute la semaine ! Bien que freinés tout au long du chemin de descente par les tentatrices myrtilles, nous arrivons dans l'après-midi au refuge où nous sommes accueillis par le thé à la menthe de Jean-Claude Armand et ses deux aides gardiens tout mignons qui nous racontent des histoires à dormir debout et essayent de nous saouler avec des petites pierres magiques imbibées de Genépi.
Lundi, après un sage départ sur sentier balisé par le col des Clochettes et celui de Colombes, Vito mène la belle ascension du Pic Turbat, des retardataires fort dissipés iront batifoler sur d'avenants blocs granitiques où les mains se font baladeuses. Après le regroupement au sommet (3028 m) où le paysage joue à cache-cache avec la mer de nuages qui remontent des vallées, les affamés tentent un retour en boucle par la crête du Chamousset et son névé, mais renoncent à poser le rappel nécessaire pour descendre de la Brèche de Chamousset - la roche y est trop délitée - et se rabattent de bon cœur sur le Farniente des bords du Lac Lautier, baignade ravigotante et psychobloc... Peu motivés par un retour au refuge à la mode "GR", nous optons pour une exploration du déversoir du lac : on bondit de part et d'autre du torrent plongeant en cascades dans un brouillard digne d'une lande écossaise! La marche du jour se termine avec un retour au calme sur le paisible sentier presqu'horizontal traversant le mélézin de la Bonne Draye. Bien que le refuge ait passé la majorité de la journée sous la mer de nuage, la douche solaire en plein air est fort appréciée (du moins pour ceux qui n'ont pas confondu les robinets d'eaux chaude et froide!).
Mardi le départ pour le refuge de l'Olan nous fera passer par le Lac Lautier et le Pas de l'Olan. Nicolas - le régional de l'étape - est le guide du jour : « Allez les Loulous! », il rêve d'un descente au village de la Chapelle en Valgaudemar, pour aller y razzier des tourtons du Champsaur, spécialité délicieuse de la région... Nous parvenons avec peine à le dissuader du détour au dénivelé trop conséquent pour nos mollets sarthois (pas de retour en vallée avant la semaine prochaine !), et arrivons en début d'après-midi au refuge perché au bord du précipice qui surplombe la Chapelle. Enfin un peu de connexion : nous donnons des nouvelles aux familles mais Mélanie la gardienne nous rappelle à l'ordre ! Une vraie bande d'ados pris en faute ;) Elle nous autorise quand même à brancher nos téléphones … ouf! Chorégraphie aérienne des Vautours qui nous observent grillant sur la terrasse ensoleillée...
Mercredi, nous nous engageons sur les pierriers de la voie normale de la Cime du Vallon pour bifurquer sur la rampe engagée (corde et anneaux roses sont de sortie!) du Passage du Bâton (2960 m) d'où la mer de nuage nous envoûte et nous rappelle la magie de la montagne!
Au soir, l'arrivée tardive au refuge pour la nuit de deux wingsuiters qui roulent des mécaniques ne passe pas inaperçue, ils ont le projet de s'élancer le lendemain de l'Olan, nous serions donc susceptibles de les recroiser...
Jeudi nous partons pour le clou de notre semaine en montagne : le refuge de Font Turbat où nous serons accueillis par Anouchka , la meilleure cuisinière, la meilleure gardienne de refuge du monde : elle nous séduit tous par son accueil et son professionnalisme. Nous ferons la plonge, nous lui descendrons ses poubelles en fin de séjour. Quels merveilleux moments dans ce refuge ! Tout y est : les poules pour les œufs brouillés du matin, la divine tomme de chèvre sec du Désert, affinée dans le sous-sol du refuge, un concert chaque soir, les étoiles filantes, des conseils précieux de météo et d'ascensions, des moutons et un patou gentil (conseil d 'Anouchka : lui parler car il est presque aveugle). Mais ce refuge se mérite, tout au moins dans l'itinéraire de Jean qui nous a concocté une "petite traversée" pleine de rebondissements : les vires du Banc de la Conche , que les accompagnateurs locaux citeront plus tard en référence lorsqu'ils nous conseilleront des passages difficiles «…mais vous pouvez y aller sans problème, vous avez fait le Banc de la Conche … ».
Coraline à Jean : « C'est où le chemin ? »
Jean à Coraline : « Aucune idée »
Qu'est ce qui ressemble plus à un cairn qu'un tas de cailloux?
Jean-Yves à tous : « Un Cairn, C'est par là ! »
Jean : « ...ou pas... »
Coraline à Jean « Mais là ça passe !? »
Jean : « ...ou pas! »
Catastrophe potentielle : l'un d'entre nous que je ne saurais nommer lâche sa chaussure 20 m en contrebas d'une pente quasi inaccessible : la chaussure basse devient chaussure montante à la ceinture de Jean, qui ne manque jamais une occasion d'improviser un petit rappel sur becquet, histoire de ne pas trimballer inutilement sa corde. Au même moment un souffle presque assourdissant résonne au-dessus de nos têtes : un aigle jaune fluo nous survole à toute vitesse : le wingsuiter nous crie "HOLAAA !" Vision surnaturelle qui détend l'atmosphère! OUF ce n'est pas Alexis qui est tombé !!
Sylvie se fait un peu peur… « mais qu'est-ce que je fous la ? »
Cathy à Sylvie : « Respire ! »
Entre moulinette et encordement, ce jour-là nous utiliserons la corde à plusieurs reprises.
Jean à Vito : « Libère la Corde ! »
Vito à Jean : « Et moi je fais comment pour descendre ? »
Cathy à Vito : « Respire ! »
Nous découvrons que nous sommes un groupe soudé, superbe esprit d'entraide.
Vendredi : après avoir atteint l'ombrageux Lac des Pissoux, les acharnés de la troupe grimpent hors piste comme d'inconscients cabris, un reste de sérieux les retient malgré leur fougue d'atteindre la brèche de l'Olan, défendue par un névé trop raide et à la neige trop dure ; le perché "Névé Ovale", défendu lui par une brèche carrée trop engagée, nous donne rendez-vous pour une prochaine ascension de l'Olan... La redescente est plus sage, du moins jusqu'au névé du Lac des Pissoux en état alors pour nous voir godiller à loisir... on passe ensuite au pied des nouvelles voies équipées en juin dernier par Anouchka sur les falaises à proximité du refuge, envie de revenir les tester...
Samedi : Nous avons du mal à prendre le large, enchainons Vallonnet, petit Vallon, grand Vallon, passons sous l’arrête de Murois qui elle aussi réclame notre future visite, pause de "midi" auprès d'une cascade au granit sculpté qui invite aux glissades, Coraline donne de sa personne , elle dévie le torrent pour apporter un peu de fraîcheur à un Vito qui n'en demandait pas tant.... recherche d'itinéraire à l'aveuglette pour trouver la Vire à la bicyclette (moins impressionnante que prévue!), la piste pour atteindre ensuite le Désert et clôturer notre tour semble extrêmement... horizontale!
Merci à vous tous !!! les glissades dans les névés et la crapahute de blocs en grosses couronneront cette magnifique semaine avec un leader et des compagnons hors pair, et la découverte de cette montagne sauvage entre Valjouffrey et Valgaudemar, parcourue de cascades et parsemée de myrtilles et de framboises.
A l'année prochaine !
Cathy à tous : « Youhou ! »